Eh bien, on y est: Comscore vient d'annoncer que MySpace était passé en tête devant Yahoo des sites les plus actifs (38.7 contre 38.1 milliards de pages vues)
La technologie AJAX risque de provoquer de fortes secousses (un tsunami ?) sur Internet: cette nouvelle technique de développement des applications et services Internet va remettre en cause la validité de l'étalon par lequel la manne financière de la publicité en ligne est actuellement répartie.
Cet étalon, c'est l'impression de page. C'est une mesure parmi d'autres ( visiteurs, visites, durée de visites, etc...) de la valeur médiatico-publicitaire d'un site internet. Cette forme de mesure est très importante (la plus importante ?) pour les publicitaires car elle détermine finalement "l'espace publicitaire" à disposition pour placer les bannières ou les boîtes Google AdSense. Par ailleurs, elle donne une vision simple et appréhendable par tous de la fréquentation d'un site.
Revenons à la base: en jargon Internet, une impression de page ("page view" ou "page impression" en anglais), c'est quand un serveur Web envoie une nouvelle page web (complète) vers le navigateur d'un internaute qui a demandé cette page par un clic.
Cet internaute attend cette page avant de continuer sa navigation: le processus est donc synchrone pour l'utilisateur
AJAX apporte de nombreux bouleversements à cette architecture traditionnelle:
1) Le 1er "A" de la technologie AJAX veut dire "Asynchrone": la révolution de cette technologie est que le navigateur Internet anticipe l'activité de l'utilisateur en allant demander en arrière-plan (i.e. sans que l'utilisateur ne le perçoive) au serveur des morceaux de contenus dont l'utilisateur va
vraisemblablement avoir besoin.
L'exemple canonique de ce comportement asynchrone d'AJAX, c'est Google Maps: pendant que vous regardez les cartes courantes, votre navigateur va pré-charger les cartes adjacentes afin de pouvoir vous les montrer instantanément dès que vous vous déplacez dans une direction ou l'autre.
2) Une autre évolution apportée par AJAX est que l'on ne va pas forcément chercher une page entière mais que l'on rafraîchit seulement un fragment de la page en cours par des données fraîchement rapportées (toujours en mode asynchrone). Les widgets sont également une matérialisation de cette fragmentation des pages Web.
3) Enfin, en utilisant les astuces de présentation permises par la combinaison Javascript + CSS: il est possible d'avoir une donnée présente dans la page mais de la cacher jusqu'au moment où l'utilisateur la demande. Elle devient visible par un changement d'attribut CSS activé par Javascript.
Au vu des 3 cas ci-dessus, on arrive à une situation technologique où la définition d'une impression de page devient quasi-impossible. Doit-on fait +1 au compteur d'activité des impressions de page:
- seulement quand on envoie une page complète? Au pire, cela veut une seule fois puisque l'ensemble d'une application AJAX peut se dérouler à partir d'un seul et unique chargement de page entière complété par des rafraîchissements ultérieurs partiels (cf ci-dessus)
- chaque fois que l'on envoie un fragment de données? Est-ce honnête si cet est vraiment microscopique ou si il n'est finalement jamais affiché ?
- quand on rend visible une donnée présente depuis le début dans la page mais cachée par le "jeu CSS" ? Cela veut dire que la mesure d'activité ne se passe plus seulement au niveau du serveur mais aussi à travers des informations complémentaires remontées depuis les navigateurs. Bonjour, la complexité!
La conséquence négative d'AJAX , c'est donc que la mesure d'activité des sites Internet va replonger dans une vague de flou profond néfaste aux sociétés médias qui engrangent leurs revenus publicitaires grâce à des chiffres d'activité les plus élevées possible (certains n'hésitent même pas à "piper les dés"...). En corollaire, les sociétés à la Comscore, Nielsen, etc... qui vivent de la production / certification de ces chiffres vont aussi passer des moments (très) pénibles.
La conséquence positive d'AJAX, c'est que les applications qui l'utilisent (à bon escient) deviennent incroyablement plus efficaces: l'utilisateur économise l'attente du chargement de données (via le chargement asynchrone) et ne voit à un moment donné que ce dont il a réellement besoin (via les astuces CSS) pour la tâche en cours.
Donc, il n'y pas à hésiter: il faut aller vers AJAX car ce qui sert au mieux l'utilisateur est toujours finalement bon pour le fournisseur même si cela le fait passer par quelques "remous"...
Yahoo, pionnier de l'AJAX à grande échelle, a donc raison d'y aller "pleins gaz" d'autant que sa renommée lui permettra de passer outre les chiffres "farfelus" des analyseurs. C'est un Yahoo qui peut les faire bouger pour s'adapter!
Concernant la mesure d'activité, elle continuera via d'autres grandeurs: le monde des médias sera toujours structuré à travers des chiffres. Ces grandeurs sont celles qui existent par ailleurs et qu'AJAX ne bouleverse pas (cf. introduction) et puis d'autres à inventer.
Mais, il faudra savoir et pouvoir laisser du temps au temps pour faire émerger ces nouvelles métriques...
Source: blog Media & Tech (par didier durand)
8 commentaires:
Le problème se pose déjà depuis longtemps d'ailleurs pour les sites utilisant Flash.
Bonjour,
Absolument, c'est très juste! (J'essaierai d'y revenir)
Et Flash est en pleine explosion: Youtube, Scrybe
Merci du rappel à l'ordre
didier
Comscore et Nielsen fournissent justement des données sur les visiteurs uniques et de parts de marché. Donc au contraire leur poids va se renforcer.
D'ailleurs j'ai un doute sur ton exemple de Myspace et Yahoo car l'influence d'Ajax pèse sur les pages vues non sur les UU. Or Comcore donne justement une évaluation des UU. Donc l'écart mesuré n'est a priori pas basé sur les pages vues.
Par ailleurs Myspace est une usine à produire de la page vue sans intérêt, la moindre action génère 5 ou 10 page vues là ou n'importe que site avec une ergonomie potable n'en génère que 2 ou 3.
Tu avais raison il s'agissait de pages vues et non de visiteurs uniques ce qui rend la comparaison totalement ridicule. C'est la prime aux sites poubelles.
Alors peut-être que les cahiers des charges vont demander des documents de conception technique plus poussés dans lesquels les méthodes de développement de type AJAX seront étudiées plus finement...
Avec les toolkits de développement et la mode du 2.0, nul doute que ce soit souvent codé à l'arrache par une batterie de développeur "Web 2.0 Inside" sans autre souci que le résultat visuel à la cliquette. C'est normal.
Il faut savoir que si les tenants et aboutissants de la technologie échappent au concepteur ou au chef de projet, ça n'est pas le développeur Web qui va y penser pour vous (ou alors vous en avez un très bon qui ne va pas rester là longtemps).
L'optimisation de la structure et de la syntaxe du code HTML a été revue après l'évangélisation XHTML/CSS2 et les problématiques de standards, poids de page, maintenabilité, pérennité et, non des moindres, référencement naturel.
Cela fait des années qu'on se sait incapables de fournir des statistiques fiables (visiteurs unique, pages vues, ..), si ce n'est une tendance, à architecture égale.
Il faut peut-être regarder du côté des clients et des agences Web pour qu'à terme un label de développement émerge qui permette d'auditer un site de manière fiable. Si ça n'est pas encore une demande, ça pourrait être un besoin. ;)
En tout cas si on ne commence pas par là nous resterons dans l'obscurité. Non ?
Je suis quand même un peu con de donner des super idées de tendances et de services innovants même pas sur mon blog...
P.S. : toujours aussi agréable la lecture ici.
Bonjour Emanuel,
Comscore fournit les 2: pages vues et visiteurs uniques.
Mais, là la proclamation de MySpace comme #1 vient des pages vues.
C'est ce point que je voulais "remettre d'équerre". Le travail de Comscore sur les visiteurs reste valide et utile.
Bonjour D.VDA,
La générosité est toujours finalement récompensée... aussi celle qui donne des idées à d'autres.
En tout cas, c'est que je crois!
(merci pour les "fleurs").
didier
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