jeudi, décembre 01, 2005

Le plus grand roman français (13'000 pages) en ligne: "Artamène ou le grand Cyrus"

La démarche de l'Université de Neuchâtel ci-dessous est encore une illustration du fameux phénomène de "la Longue Traîne" ("The Long Tail"): l'Internet - par ses faibles coûts de stockage/distribution et par son accessibilité globale - permet à des oeuvres de niche de retrouver une vie (après digitalisation) en leur permettant de trouver "leur public" inaccessible autrement que par ce canal en ligne global (au sens géographique) et très peu coûteux.

En effet, alors qu'aucun éditeur ne veut publier le plus long roman en langue française "Artamène ou le Grand Cyrus" (13'095 pages), l'Université de Neuchatel met en ligne l'intégralité du roman agrémentée de facilités hypertexte destinées à en améliorer la lecture supposée ardue.

Pourquoi cette démarche ? La page d'accueil dit:

Artamène ou le Grand Cyrus est-il véritablement cette œuvre d'une lecture ardue, voire impossible, que les commentateurs se sont acharnés depuis trois siècles à dénigrer, même lorsqu'ils lui reconnaissaient des qualités ?

Le plus long roman français pèche-t-il vraiment par démesure, par profusion, par redondance ?

Comment dès lors expliquer le succès immense de l'ouvrage auprès du public de l'époque ?

Et si tout cela n'était qu'un problème de " lecture " ?

La lecture intime et linéaire, telle que nous l'appliquons à tous les textes littéraires, est-elle vraiment le moyen approprié d'aborder le Grand Cyrus ? Œuvre élaborée au sein d'un salon, le roman n'est-il pas lui aussi conçu en fonction du mode de consommation des genres mondains, la lecture à haute voix dans un contexte social interactif : une lecture par extraits renvoyant à d'autres extraits, devant un auditoire choisi, dont les membres sont capables de mettre en relation les composantes de l'ouvrage entre elles, de les commenter et de suggérer diverses pistes dans le développement de l'intrigue ?

Redonner une chance au Grand Cyrus, c'est peut-être retrouver ce mode de consommation originel.

A défaut de reconstituer le modèle social du salon, ne peut-on au moins en retrouver l'esprit dans les possibilités d'accès au texte et les facultés interactives propres à Internet ?

Hyperliens, c'est-à-dire renvois…

Parcours de lecture non linéaires au gré des suggestions de l'auditoire, en d'autres termes "navigation" …

Suggestions de renvois ou de mises en parallèle, autrement dit propositions interactives…

Ainsi, délivré de sa gangue de papier, transposé sur un support malléable et mobile, mué en lieu d'échanges, le roman de Madeleine de Scudéry retrouvera peut-être enfin sa lisibilité.

Aucun commentaire: